Je suis issu d’une famille de 9 enfants. Six garçons et trois filles. À Williamsville où nous avons été éduqués par nos parents, nous ne manquions de rien bien que papa fût d’une situation des plus modestes. Venu du Burkina-Faso pour s’implanter en Côte d’Ivoire avant l’ère des indépendances, il consacra sa jeunesse à travailler dur, commençant par exercer en tant que cuisinier-boy dans une famille européenne résidant dans la commune du Plateau. Au départ de ses patrons en France, papa Bancé utilisa ses économies pour créer une blanchisserie dans laquelle il faisait lui-même le service. Après des années passées à exercer comme blanchisseur à Adjamé, il devint commerçant d’électroménagers, à la Rue du commerce, dans la commune des chauves-souris… Entre temps, il avait mis 9 enfants au monde, qu’il s’arrangeait à scolariser dans les meilleures écoles : Notre dame d’Afrique, Mission libanaise…
Comment ce boy, en l’occurence, analphabète, devenu blanchisseur et par la suite commerçant, s’était-il arrangé pour s’occuper des nombreux membres de sa famille et de parvenir à le faire dans l’intégrité et la dignité ? C’est la question que se posent aujourd’hui, beaucoup d’enfants devenus parents à leur tour.
À l’image de Papa Bancé, ils sont nombreux, ces parents d’autrefois, qui, sans même savoir lire pour certains, avaient un sens exquis de la gestion de l’argent au point où ils pourraient donner des cours d’Économie aux jeunes étudiants, aux parents comtemporains, ou encore à nos chefs d’État qui ont du mal avec la répartition équitable des biens d’une nation.
Les nouveaux parents que nous sommes, gagnons, pour beaucoup d’entre nous, mieux que ce que touchaient nos parents d’avant-avant. Avec une famille nombreuse dont ils avaient la charge, ils s’en occupaient convenablement alors que nous, avec à peine un enfant ou deux sous notre coupole, peinions à placer la barre haut.
Comment nos parents s’y prenaient-ils, pour être de si excellents éducateurs avec très peu de moyens à leurs portées ? Nous avons besoin qu’ils nous fassent asseoir par terre pour nous donner des conseils.
Louis-César BANCÉ