Sadio Mané est tout petit lorsqu’à Bambali, son village natal, il est épris de football. Ses idoles sont Ronaldihno et El Hadj Diouf, l’emblématique attaquant du Sénégal aux cheveux de feu qui a fait les beaux temps des Lions de la Teranga. Sadio rêve lui aussi un jour de devenir un grand joueur et de passer à la télévision.
Cependant, son père, un imam ainsi que l’ensemble de sa famille, sont contre ses ambitions footballistiques : pour eux, le garçon est en train de dérouter. D’ailleurs, à l’âge de 15 ans, ce dernier fait une fugue, quittant son village pour rejoindre Dakar, la capitale, à plus de 300 kilomètres, dans l’espoir d’y faire ses preuves avec le ballon rond, taper dans l’œil d’un recruteur, et pourquoi pas, s’envoler pour l’Europe. Malheureusement une semaine après, ses parents le retrouvent et le ramènent manu militari au village en le grondant sévèrement :
- -Ça va dans ta tête, toi, petit voyou ! Tu nous as fait une peur bleue. La prochaine fois que tu t’enfuis, nous te mettrons le feu aux fesses ! L’adolescent, sans se laisser intimider par la colère familiale, parle calmement aux siens du rêve qui est le sien. Pour les convaincre, il leur dit même ce qu’il pourrait réaliser en faveur de son pauvre village si jamais il réussissait à devenir un footballeur professionnel, car c’est un milieu qui rapporte énormément. Les parents analysent les idées et les arguments du gamin, qui semble quand même avoir la tête sur les épaules. Ils lui donnent leur bénédiction pour un autre départ en ville. Sadio Mané, avec des chaussures usées et un maillot délabré, tente l’aventure à M’bour, la plus grande ville du football au Sénégal. Là, 2 ans plus tard, à l’occasion d’un tournoi »navétane » communément appelé »comité » en Côte d’Ivoire, il tape à l’œil d’un recruteur qui l’engage à l’As Génération Foot, un club de Dakar. Sadio hisse le club en deuxième division et aussitôt, c’est le cap sur la France où il fait sensation au Fc Metz. Son talent lui fait gravir des échelons. Après des clubs intermédiaires, c’est le jackpot avec la signature de contrat à Liverpool, un club où son idole El Hadj Diouf a évolué à partir de 2002. Quelle ironie du sort ! Non seulement Sadio parvient à se faire enrôler dans le même club de son idole d’enfance, mais aussi, il réussit à multiplier par deux le contrat de ce dernier en signant pour 36 millions d’euros alors que Diouf pesait 18 millions d’euros chez les Reds. Ce n’est pas tout, le natif de Bambali devient le footballeur africain le plus cher de l’histoire du club, et le deuxième, toutes nationalités confondues, derrière le britannique Andy Carroll. Sadio Mané dépasse aussi le nombre de buts inscrits en league anglaise par ses compatriotes Demba Bâ, El Hadj Diouf et Henri Camara, devenant ainsi le meilleur joueur sénégalais du football britannique et même du football mondial ! Le villageois de Bambali est en sus sacré ballon d’or africain ! Sadio Mané n’a pas oublié la promesse faite aux siens. Il va au delà de sortir sa famille biologique de la précarité en faisant construire dans son village un lycée à plus de 150 millions de franc CFA. Il y fait bâtir également un hôpital à plus de 2 milliards. Sadio, au cœur d’or, participe au quotidien à la pitance d’une multitude d’indigents au Sénégal et à travers le monde. Le message qu’il délivre pour justifier sa générosité est des plus émouvants : « Dieu m’a fait la grâce d’avoir un peu d’argent, et je crois qu’il ne l’a pas fait pour que je puisse le dépenser en faisant des folies dans l’achat des Ferrari alors qu’il y a des gens qui souffrent autour de moi. Je ne suis pas impressionné par le matériel ni par le m’as-tu-vu. Je préfère utiliser ma fortune pour le bonheur des plus pauvres… » En finale de la Coupe d’Afrique des Nations face à l’Égypte ce 6 février 2022, Sadio Mané donne au Sénégal sa première Coupe d’Afrique des Nations, pour achever l’œuvre entamée en 2002 par l’époustouflant groupe d’El Hadj Diouf et d’Aliou Cissé, devenu entraineur des Lions de la Teranga vingt ans plus tard, comme pour prendre sa revanche face à l’histoire… Il l’a réussi avec Mané ! Parce que j’aime les belles histoires et crois aux happy ends, Sadio Mané nous devait cette étoile qui fait de son histoire l’une des plus belles d’un footballeur africain parti des ghettos pour toucher des gratte-ciels !
Louis-César BANCÉ