Cela fait environ un an que Charlène et moi nous sommes séparés. Au cours de cet intervalle de distanciation, elle a eu un autre amoureux, un haut cadre exerçant dans le milieu politique. J’avoue avoir été jaloux d’apprendre que mon ex s’est mise avec quelqu’un d’important. S’il avait été juste en dessous de moi sur le plan social, j’aurais mieux supporté. Simple professeur dans un lycée privé, je n’étais pas assez bien rémunéré. C’est d’ailleurs l’une des raisons principales qui fit que ma petite amie eut du mal à s’accommoder à mon niveau salarial, elle qui n’eut la chance d’avoir que des hommes nantis au cours de ses relations antérieures. Je ne lui en voulais pas non plus d’avoir demandé notre rupture. Je préférais encore cette franchise à l’ineptie de certaines filles qui elles, voguent entre deux hommes, jouant à un jeu de duperie écœurant.
J’avais refait ma vie amoureuse en ayant pour nouvelle petite amie l’une de mes élèves de la classe de Terminale. Franchement, pour son jeune âge, 20 ans à peine, je trouvais Yasmine très intelligente. En tout cas plus mâture même que mon ex Charlène malgré qu’elle fût sa cadette. Et nous nous entendions si bien qu’elle quitta son domicile familiale pour venir vivre chez moi. Désormais à ma charge, Yasmine était à la fois ma copine et ma filleule voire même ma fille. Jamais l’idée de la tromper ne me vint en tête jusqu’au jour où Charlène, mon ex, m’envoya un message à la veille de son mariage, disant incroyablement qu’elle voulait enterrer sa vie de jeune fille avec moi, et que je lui manquais. Cette nuit-là, nous nous sommes retrouvés pour des adieux intimes, et le lendemain, je pris part à la célébration de ses noces, à l’hôtel communal. Son mari, monsieur Seriba Coulibaly, homme politique puissant du pays, était tout souriant lors de la cérémonie, dans son brillant costume noir. Moi aussi j’étais souriant depuis l’assemblée, ressentant un certain plaisir de ce que la mariée se soit offerte à moi, la veille… C’était jouissif. Je revivais dans ma tête l’instant où elle me tutoyait le pontife avec cette même bouche qui lui servait de dire OUI à son homme devant le maire.
À la réception nuptiale cependant, je fus très intrigué par la présence de Yasmine, ma petite amie. Elle n’avait pas été à la mairie mais était venue pour le partage du repas.
- Qu’est-ce que tu fais ici, chérie ? lui demandai-je subtilement.Tu m’avais dit que tu partais ce samedi en visite chez tes parents, non ?
- Oh, je ne voulais pas t’importuner. Et toi-même, que fais-tu là ?
Nos questions restèrent pendues, suspendues, au statu quo, puis nous prenions part au festin comme si de rien n’était.
Le soir à la maison, profitant de ce que Yasmine était sous la douche, je pris son téléphone qu’elle avait abandonné sur la table. Après trois tentatives, je réussis à trouver le code de déverrouillage dont j’avais une vague idée. Très vite, je parcourus les messages et tombai sur des échanges suspects entre un certain Seriba Coulibaly et ma filleule. Figurez-vous que la photo de profil de ce Seriba correspondait au mari de Charlène, mon ex… Je pus découvrir que la veille, ma petite amie eut un rendez-vous intime avec le nouveau marié. En descendant en profondeur dans leur dialogue je compris qu’il ne s’était pas agi d’un simple rendez-vous d’adieu comme ce fut le cas pour moi. Ma Yasmine entretenait une liaison avec le mari de mon ex, à mon insue, et ils comptaient bien ne pas s’arrêter là.
Or, pendant que je prenais du bon temps avec Charlène, son homme en faisait autant avec ma petite, à la même heure. Je me sentais si offensé, si sali, si humilié que pour ne pas commettre l’irréparable, je devrais demander à l’élève de quitter ma maison. C’est ce que je fis dès sa sortie de la salle de bain :
- Pétasse ! Prends tes bagages et retourne chez ton père !
Yasmine avait tout compris en voyant son téléphone dans ma main. Sans piper mot, elle rangea ses affaires, et partit de chez moi avec ses gros mollets, pendant que je l’accompagnais avec les injures les plus dégradantes. Trois semaines plus tard, j’appris qu’elle était en couple avec monsieur Sadjiguiba, professeur d’EPS officiant dans le même établissement que moi. Ce faux type savait pourtant que la petite avait fait un stage dans mon pantalon avant que je ne la renvoie.
Yasmine ne valait plus rien à mes yeux, et pourtant, je brûlais de rage de la voir en couple avec mon collègue enseignant… J’avais détecté dans les regards de ce dernier à quel point il m’enviait quand j’étais en couple avec l’élève. Rien qu’à penser qu’il avait réalisé son fantasme, j’en rageais. Haha ! ces ex qu’on a éjectées, et qui dans la séparation nous font doublement du mal dans le choix incongru de leur nouveau conjoint : feu sur elles !
Louis-César BANCÉ